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La diplomatie économique des nouvelles puissances

Cet article est paru à l’origine dans la Revue Géoéconomie de Décembre 2011. La version originale peut-être consultée sur le site CAIRN ici.

Le sommet de Pittsburgh en septembre 2009 a consacré le G20, qui regroupe les 20 plus grandes économies de la planète et représente 90 % du PIB mondial, comme le principal forum de discussion des grandes questions économiques et financières internationales, faisant du G7 une réalité historiquement datée, selon les mots du président brésilien Lula. Ce faisant le G20 a mis en lumière de nouvelles puissances, qui aspirent à jouer un rôle plus actif dans la gouvernance mondiale, au côté des économies du G7 (États-Unis, Japon, Allemagne, France, Grande-Bretagne, Italie, Canada). Ces nouvelles puissances émergentes – ou ré-émergentes [1]– incluent les BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) mais aussi des pays comme la Corée du Sud, l’Indonésie, le Mexique, l’Afrique du Sud, la Turquie, l’Arabie Saoudite ou encore l’Argentine.

Ces puissances appartiennent à des ensembles géographiques et culturels disparates, et sont tributaires d’expériences qui leur sont propres. Il est donc difficile d’inférer, de l’étude des expériences nationales, des conclusions qui s’appliqueraient ad idem à l’ensemble de ces pays. Néanmoins, sur ce terrain par excellence de l’interaction entre action publique et initiative privée qu’est la diplomatie économique, les dynamiques à l’œuvre au sein de ces nouvelles puissances présentent des caractéristiques communes, que l’on peut relier au contexte dans lequel ces dynamiques s’inscrivent. C’est pourquoi, avant d’évoquer diverses expériences nationales, il convient de préciser ce que l’on entend par diplomatie économique, dans un contexte de mondialisation qui se traduit, nolens volens, par une diminution du rôle des États, et de leur influence sur des acteurs privés engagés dans des échanges qui transcendent les frontières politiques.

La notion de diplomatie est de prime abord indissociable de celle d’État. On pourrait la définir comme la poursuite par des moyens pacifiques – c’est-àdire par la négociation – de certaines fins (puissance, sécurité) par des États engagés dans des relations avec d’autres États. Cette définition minimaliste et procédurale fait apparaître la diplomatie essentiellement comme un modus operandi, au service de fins qui la dépassent. Est-ce à dire que la diplomatie n’est que la continuation de la guerre par d’autres moyens, comme semblent le penser les théoriciens du courant réaliste, de Hans Morgenthau à Henri Kissinger, en passant par Raymond Aron ? Appliquée à l’économie, cette approche réactive la vieille idée mercantiliste de « guerre économique », que se livreraient les nations dans un jeu à somme nulle [2]. La diplomatie économique ne serait alors qu’une manière pour un État de renforcer sa puissance face aux autres États, en se servant des moyens de l’économie : négociations commerciales internationales (de type GATT/OMC), mesures de soutien à l’expansion internationale des entreprises nationales, ou à l’inverse, mesures d’attraction des investissements étrangers sur le sol national.

Mais, s’il est vrai que l’on ne peut évacuer le « nationalisme méthodologique » lorsque l’on aborde les questions de défense et de sécurité, qui touchent à la survie même des États, la transposition pure et simple d’une telle vision hobbesienne aux questions économiques et financières méconnaît profondément les interdépendances multiples, qui existent à l’échelle de la planète entre différents acteurs économiques, publics ou privés, indépendamment de leur « nationalité [3]. Ces interdépendances créent de facto un espace de représentations individuelles et collectives dégagées, en partie, des présupposés d’un référentiel stato-centré. Les diasporas aux identités multiples, à la fois d’ici et de là-bas, comme la diaspora d’affaires chinoise en Asie du Sud-Est, ou la diaspora indienne au Moyen-Orient et en Afrique orientale, mais aussi aux États-Unis, illustrent bien cette nouvelle donne transnationale.

5Autrement dit, comme le souligne Guy Carron de la Carrière [4] la prise en compte des transformations engendrées par la mondialisation éloigne de plus en plus la diplomatie économique des canons de la diplomatie régalienne traditionnelle. Ces transformations sapent « l’unité de temps et de lieu » de la diplomatie classique, en opérant à la fois par le haut, avec l’insertion des négociations économiques et commerciales dans un cadre multilatéral [5] et par le bas, avec l’émergence d’une diplomatie non gouvernementale, dite de track II ou track III, selon la terminologie anglo-saxonne. Cette dernière est caractérisée par l’immixtion de différents groupes d’intérêts (grandes entreprises, lobbies d’affaires, ONG, diasporas, collectivités locales) dans le champ de la négociation internationale [6]. Dans ce contexte, même s’ils continuent de fixer l’agenda, les diplomates professionnels ne représentent plus qu’un pôle parmi d’autres, dans un jeu d’interactions complexes.

À cet égard, il faut sans doute distinguer les États unitaires forts, comme la Chine ou la Russie, avec une tradition bien ancrée de centralisation des décisions politiques et administratives – ce que Vladimir Poutine appelle « la verticale du pouvoir » – qui se reflète dans les modalités et les formes de leur diplomatie économique [7] des grands États décentralisés comme le Brésil ou l’Inde, où la décision politique est le résultat d’un compromis, acquis de haute lutte, par la négociation entre une pluralité d’acteurs aux intérêts divergents, voire contradictoires. Ainsi, pour prendre l’exemple du Brésil, quelle cohérence doctrinale y a-t-il, a priori, entre la position de ce pays en faveur d’une libéralisation totale des échanges agricoles, visiblement inspirée par le lobby de l’agrobusiness, et sa revendication, au côté de l’Inde et de l’Afrique du Sud [8] pour un traitement différencié en matière de droit des brevets pharmaceutiques ?

Tout comme pour les pays du G7, la diplomatie économique des grandes puissances émergentes doit s’adapter à la mondialisation, et à l’estompement des limites qu’elle entraîne entre les sphères interne et externe. À l’ère de la mobilité des biens, des personnes et des capitaux, cette diplomatie doit constamment se « décentrer », pour intégrer les revendications de divers groupes de pression diffus, qui se substituent à un « intérêt national » défini de manière trop étroite. Là encore, il faut nuancer le propos, selon que l’on considère des États dirigés par un pouvoir exécutif fort ou par des majorités parlementaires. Il faut aussi tenir compte du degré d’autonomie de l’administration – ministère des Affaires étrangères et ministères « sectoriels » chargés de l’Économie et des Finances – par rapport au pouvoir politique. L’existence de traditions diplomatiques bien établies atteste de cette autonomie, comme le montrent les exemples de l’Itamaraty au Brésil ou du MID en Russie [9].

Cela ne signifie pas pour autant que les États aient renoncé à toute prérogative régalienne en matière de diplomatie économique. Celle-ci reflète in fine la politique économique mise en œuvre sur le plan interne, et il ne faut pas négliger la dimension coercitive de l’« arme économique », surtout lorsqu’elle est utilisée à des fins politiques [10]. De plus, certaines questions comme l’énergie mettent en jeu des intérêts géostratégiques tellement importants, que ces derniers priment souvent sur les considérations purement commerciales, et relèvent en dernier ressort des instances politiques [11]. Enfin, les États conservent la haute main sur les questions financières et monétaires, perçues comme des attributs essentiels de la souveraineté. Le débat sur la « guerre des monnaies » et l’absence de consensus au sein des pays du G20 sur les causes des grands déséquilibres de balances courantes – tantôt attribués à la sous-évaluation de la monnaie chinoise, et tantôt à l’endettement excessif des ménages américains – illustrent la permanence d’antagonismes latents, qui relativisent la vision irénique d’un monde entièrement pacifié par le commerce [12].

Mais en définitive, la capacité à se projeter à l’extérieur – ce que Joseph Nye appelle le soft power – est beaucoup plus tributaire de la puissance financière, et de l’attractivité per se d’une économie, que de vaines gesticulations politiques. À cet égard, les lois d’airain de l’économie finissent toujours par l’emporter sur les constructions idéologiques. C’est ce que montre l’échec du projet de Nouvel ordre économique international (NOEI), défendu par les pays du Sud dans les années 1970, et le succès, a contrario, des coalitions à géométrie variable entre plusieurs pays émergents dans les années 2000. Dans le premier cas, l’entente entre pays en développement, réunis au sein du G77, était fondée sur la revendication d’un « droit générique au développement » et sur une opposition systématique aux pays du Nord. Mais cette entente a rapidement achoppé sur l’hétérogénéité des situations propres à chaque pays [13][13]Le G77 rassemblait à la fois des pays exportateurs et des pays…. Dans le second cas, le G20-Sud constitué autour du Brésil a réussi à « casser » la mainmise des États-Unis et de l’Union européenne sur l’OMC [14] à partir d’un constat partagé entre les 20 pays réunis à cette occasion. Le succès de cette « coalition de seconde génération », selon l’expression de Philippe Marchesin [15] repose sur le pragmatisme, le caractère ciblé des revendications et l’acceptation d’éventuelles divergences sur d’autres questions.

10À ce propos, la percée diplomatique de la Chine en Afrique dans les années 2000 doit être jugée à l’aune de ce schéma interprétatif, sur la base d’un pragmatisme assumé et de l’acceptation de différences idéologiques – notamment en matière de gouvernance politique – qui n’empêchent pas de développer des partenariats sur le plan économique. Certains parlent même d’un Consensus de Pékin [16] qui se substituerait au Consensus de Washington, pour décrire cette nouvelle relation sino-africaine. Ce Consensus serait fondé sur le respect de la souveraineté politique et sur la non-ingérence dans les affaires intérieures du pays partenaire. En un sens, c’est une réactualisation des principes de la Charte de Bandung, énoncée en 1955 à l’issue de la conférence du même nom, qui avait jeté les bases du mouvement des non-alignés. Mais, si le discours officiel n’a pas tellement changé, depuis les voyages de Zhou Enlai en Afrique jusqu’à ceux de Hu Jintao, les relations sino-africaines s’inscrivent aujourd’hui dans une logique totalement désidéologisée. Les communiqués publiés à l’issue des sommets sino-africains, dont le premier s’est déroulé à Pékin en novembre 2006, mettent l’accent sur des initiatives concrètes, comme la réduction de la dette des pays africains, et évitent à dessein les questions polémiques.

11On retrouve cette approche pragmatique chez une puissance moyenne comme la Turquie, dont le dynamisme économique et la position géostratégique exceptionnelle, à cheval entre plusieurs continents, identités et cultures, lui ouvre les horizons d’une diplomatie multipolaire, d’inspiration néo-ottomane. À défaut d’intégrer complètement l’espace européen et de se fondre dans cet espace, où sa spécificité islamique et son poids démographique font peur, la Turquie s’érige en puissance autonome, axant tous ses efforts sur la promotion de ses intérêts économiques et commerciaux. Sous l’égide de son nouveau ministre des Affaires étrangères, Ahmet Davutoglu, la diplomatie turque est devenue le meilleur allié des Tigres Anatoliens, ces entrepreneurs du BTP et du textile, proches des milieux islamo-conservateurs de l’AKP, qui sont partis à la conquête des marchés étrangers, du Maghreb à l’Asie centrale, en passant par les Balkans, le Proche-Orient et la Russie. De plus, « utilisant l’Organisation de la conférence islamique (OCI), Ankara a signé de nombreux traités de libre-échange et des accords de libre circulation avec près de 60 pays [17]. Dans un habile renversement de perspective, c’est la diplomatie classique qui se met ici au service de la diplomatie économique, cette dernière permettant en retour de consolider une influence régionale, voire mondiale, en accord avec le concept de « profondeur stratégique » défendu par Ahmet Davutoglu [18].

Dans un registre similaire, les relations d’interdépendance en matière énergétique entre l’Union européenne et la Russie, à travers des projets structurants comme les gazoducs Nord Stream et South Stream, qui relient directement les pays consommateurs du Nord et du Sud de l’Europe aux terminaux gaziers du géant Gazprom [19] participent pleinement à la renaissance d’une diplomatie russe qui retrouve pied en Europe. Ces projets sont mis en valeur par la Russie pour promouvoir un « agenda » d’intégration multidimensionnel avec le Vieux Continent, à travers des initiatives comme le « traité de sécurité européenne », proposé par le président russe Dmitri Medvedev. Il est trop tôt cependant pour dire si ces initiatives préludent à la construction d’un véritable espace commun entre la Russie et l’UE, ou si elles reflètent simplement des préoccupations de bon voisinage, et le souci de donner un habillage juridique à des rapports de type « clientfournisseur ».

13Quoi qu’il en soit, tous ces exemples montrent la dimension duale de la diplomatie économique, qui exprime, d’une part, l’instrumentalisation de l’économie par un État, au service de sa politique de puissance, dans l’acception la plus westphalienne du terme [20] et, d’autre part, le dépassement inéluctable de la logique stato-centrée, à travers l’insertion de l’économie dans des ensembles géographiques de plus en plus vastes, et la prise en compte d’intérêts non étatiques dans la conduite, sinon dans l’élaboration, de la politique étrangère. Les puissances émergentes n’échappent pas à cette dualité, qui va de pair avec l’affaiblissement tendanciel de l’influence des États sur les acteurs non étatiques [21]. À l’exception des BRIC, dont la diplomatie s’est forgée au fil des décennies, à mesure que leur puissance s’affirmait (ou se réaffirmait), pour nombre de puissances émergentes « moyennes » comme le Mexique, la Corée du Sud ou l’Indonésie, cantonnées auparavant dans une attitude passive de paradigm takers, l’enjeu essentiel consiste aujourd’hui à trouver un positionnement qui reflète cette dualité, sans susciter la méfiance des puissances établies. Dans ce contexte, la construction d’une Realpolitik adaptée aux enjeux du XXIe siècle, entre multilatéralisme de façade et multipolarité effective, passe de plus en plus par la dissociation entre la sphère géostratégique, où l’asymétrie est manifeste avec l’Hégémôn américain et ses challengers immédiats [22] (Chine, Russie), et la sphère économique, où l’utilisation judicieuse de certains « effets de levier » permet d’acquérir un « droit au chapitre » dans les enceintes internationales.

La montée en puissance des « fonds souverains » issus des pays émergents [23] à la faveur du super-cycle de croissance des années 2000, et plus encore de la crise des subprimes de 2007-2008, lorsqu’ils sont venus à la rescousse des grandes banques anglo-saxonnes en difficulté (Citigroup, Barclays, HSBC, etc.), illustre l’un de ces « effets de levier » offerts par la mondialisation. En octobre 2008, l’intervention de ces fonds souverains a contribué à stabiliser les marchés et a sans doute permis d’éviter la banqueroute de certains établissements financiers, qui étaient solvables mais à court de liquidités. Cela a permis à de petits pays émergents comme les Émirats arabes unis ou Singapour d’acquérir un capital politique appréciable aux États-Unis, où leur rôle a été perçu positivement, contrairement à la Chine qui est de plus en plus critiquée pour sa politique de sous-évaluation du yuan. De fait, même si leur mission première est de fructifier un patrimoine national, les fonds souverains s’affirment, par leur proximité avec les décideurs politiques, comme des acteurs incontournables dans la nouvelle « géopolitique du capital », qui émerge des décombres de la crise financière.

15L’innovation technologique constitue un autre exemple d’effet de levier à l’ère de la mondialisation. Il a été utilisé avec succès par les grandes firmes coréennes (Samsung, LG, Hyundai) dans les années 1990-2000, avec le soutien de leur gouvernement, pour infléchir en leur faveur les grands équilibres économiques mondiaux [24]. Ces multinationales émergentes répliquent une stratégie qui avait réussi aux firmes japonaises, des secteurs de l’automobile et de l’électronique, dans les années 1970-1980. L’engagement du gouvernement coréen en faveur de la R&D des entreprises, avec des programmes ciblés sur quelques technologies de rupture – comme les cartes mémoire dans les années 1980, ou les écrans plasma dans les années 1990 – a porté ses fruits bien au-delà des espérances. La combinaison des mesures publiques et des efforts des entreprises elles-mêmes, qui dépensent jusqu’à 10 % de leur chiffre d’affaires en R&D, a permis à des firmes comme Samsung ou LG de conquérir des parts de marché dans le monde entier, devenant de véritables ambassadeurs de la Corée du Sud à l’étranger [25].

La diplomatie économique des puissances émergentes s’appuie donc, en partie, sur des moyens sensiblement similaires à ceux utilisés par les grandes économies de la Triade. L’efficacité de cette diplomatie réside dans la capacité des acteurs publics à coordonner leurs actions avec les décisions des acteurs privés, qui échappent en tout ou en partie aux logiques de contrôle et d’influence étatique. C’est sans doute plus vrai aujourd’hui que ça ne l’a jamais été, en raison de la puissante dynamique d’intégration et d’homogénéisation à l’œuvre à l’échelle planétaire. Mais la théorie ricardienne des avantages comparatifs, qui constitue la justification du commerce international, et in fine celle de la mondialisation, trouve aussi son pendant dans le domaine diplomatique. On observe en effet une certaine forme de « spécialisation » dans ce domaine, selon des modi operandi qui permettent de maximiser l’avantage compétitif national, tout en reflétant la culture politico-administrative du pays, grand ou petit, émergent ou émergé, et sa capacité effective à intégrer les « facteurs clés de succès » qui fondent une insertion optimale dans la chaîne de production mondiale.

Notes

  • [1]
    Jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, la Chine était encore la première puissance économique mondiale. Voir A. Maddison, L’Économie mondiale. Une perspective millénaire, OCDE, 2001.
  • [2]
    Cette conception se retrouve sous des formes plus ou moins subtiles dans un grand nombre de discours et d’analyses contemporaines. Voir A. Laïdi, Les États en guerre économique, Paris, éditions du Seuil, 2010.
  • [3]
    Les réactions hostiles face à l’OPA de Mittal Steel sur le groupe Arcelor en 2006 illustrent les ambiguïtés du concept de nationalité, appliqué à des acteurs par nature transnationaux. Mittal Steel était en effet une société européenne, au sens juridique du terme, avec un siège social à Rotterdam, même si son actionnaire principal était d’origine indienne.
  • [4]
    Voir G. Carron de la Carrière, La Diplomatie économique. Le diplomate et le marché, Paris, Economica, 1998.
  • [5]
    On assiste ainsi à une « multilatéralisation » et à une « juridicisation » de questions traitées auparavant par des diplomates dans un cadre bilatéral. C’est le cas pour les questions commerciales avec l’organe de règlement des différends (ORD) de l’OMC. Ce serait aussi le cas pour les négociations environnementales, si une organisation mondiale de l’environnement voyait le jour.
  • [6]
    La reconnaissance d’un statut pour les ONG à l’ONU, et dans la plupart des agences multilatérales, dans les années 2000, est révélatrice de cette évolution.
  • [7]
    Cependant, même dans ces pays à tradition politique centralisée, l’activité économique tend à échapper partiellement ou totalement au pouvoir central. Certaines provinces chinoises disposent ainsi de leurs propres bureaux de représentation économique à l’étranger, et il n’est pas rare de rencontrer des grandes entreprises issues des pays émergents qui possèdent une « signature de crédit » supérieure à celle de leur État d’origine.
  • [8]
    Ces trois pays ont créé en juin 2003 le groupe IBSA (ou BASI en anglais), afin de coordonner leurs positions au sein de l’OMC.
  • [9]
    Ces deux ministères des Relations extérieures possèdent leur propre école de formation diplomatique : Instituto Rio Branco au Brésil, MGIMO en Russie.
  • [10]
    L’acceptation par la Chine et la Russie des sanctions économiques promues par les États-Unis contre l’Iran montre que ces pays sont prêts à sacrifier des intérêts à court terme pour préserver leur relation stratégique avec la puissance hégémonique. L’opposition du Brésil et de la Turquie à ces sanctions relève, à l’inverse, d’une posture destinée à affirmer leur statut de puissances autonomes, et leur volonté de promouvoir une vision multipolaire des relations internationales.
  • [11]
    On en a eu une illustration en 2005 lorsque le Congrès américain a opposé son veto à la tentative de rachat de la société UNOCAL par le groupe pétrolier CNOOC, contrôlé par le gouvernement chinois.
  • [12]
    Ces antagonismes soulignent aussi en creux les « ratés » de l’intégration économique et financière internationale et renvoient, au-delà du G20, aux réformes des institutions de Bretton Woods, seules à même de permettre le traitement de ces questions dans un cadre multilatéral « dépassionné ».
  • [13]
    Le G77 rassemblait à la fois des pays exportateurs et des pays importateurs nets de pétrole. Mais en réclamant un prix mondial élevé pour les matières premières, les pays exportateurs de pétrole ont mis à mal la solidarité de façade de cet ensemble hétérogène.
  • [14]
    Le blocage de la conférence de l’OMC à Cancún en septembre 2003, orchestré par le G20-Sud, avait des airs de revanche sur le sommet Nord-Sud de Cancún en octobre 1981, « torpillé » par les pays du Nord.
  • [15]
    Voir P. Marchesin, La Revanche du Sud, Paris, L’infini, 2010.
  • [16]
    Voir J. Ramo Cooper, The Beijing Consensus, The Foreign Policy Centre, 2004.
  • [17]
    Voir G. Perrier, « Les nouveaux horizons de la diplomatie turque », Le Monde, 21 avril 2010.
  • [18]
    Selon Davutoglu, la « profondeur stratégique » de la Turquie s’appuie sur sa situation géographique et historique, en tant qu’héritière directe de l’Empire ottoman. Voir A. Murinson, “The Strategic Depth Doctrine of Turkish Foreign Policy”, Middle Eastern Studies, vol. 42, n° 6, 2006.
  • [19]
    En contournant les pays de transit (Biélorussie, Ukraine) situés dans l’« étranger proche » de la Russie, avec lesquels cette dernière entretient des relations en demi-teinte.
  • [20]
    Telle que l’envisageait par exemple l’empereur allemand Guillaume II avec son projet de « Bagdadbahn » (ligne ferrée de Berlin à Bagdad) qui avait pour finalité, sous couvert de développement économique, de mettre fin à l’hégémonie franco-britannique au Moyen-Orient.
  • [21]
    Ce n’est évidemment pas le cas des acteurs étatiques, comme les grandes entreprises publiques, ou contrôlées par l’État, dont le poids constitue une caractéristique essentielle de l’économie des grands pays émergents comme la Chine, l’Inde, la Russie et le Brésil. Ce « capitalisme d’État » est évidemment plus facile à orienter dans le sens des intérêts géopolitiques de ces pays. Voir à ce sujet mon livre sur les BRIC, à paraître aux éditions Ellipses au printemps 2011.
  • [22]
    De surcroît lorsque ces pays sont liés par des alliances militaires avec les États-Unis, comme c’est le cas de la Corée du Sud depuis 1953 ou dans une moindre mesure de l’Arabie Saoudite depuis 1951 (il ne s’agit pas dans ce cas d’une « alliance » militaire stricto sensu).
  • [23]
    Les plus anciens de ces fonds, comme la Kuwait Investment Authority, remontent aux années 1950. La plupart d’entre eux ont été créés dans les années 1970, comme le fonds TEMASEK de Singapour créé en 1974, ou le fonds ADIA de l’émirat d’Abu Dhabi créé en 1976. Mais leur essor date des années 2000.
  • [24]
    Voir A. Rugman, C. Hoon Oh, “Korea’s Multinationals in a Regional World”, Journal of World Business, n° 43, 2008.En ligne
  • [25]
    En 2007, le groupe coréen Samsung a dépensé plus en R&D que le géant américain IBM, selon un rapport de l’OCDE. Voir OCDE, Tendances récentes de l’internationalisation de la R&D du secteur des entreprises, 2008.

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